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AFRIQUE – SAHEL : L’alliance des États du Sahel est un miroir aux alouettes

Date de publication : juillet 17, 2024
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En 1968, le Tchad et la RCA décidèrent à la surprise générale de s’émanciper de l’UDEAC et de s’associer à la République démocratique du Congo dans un projet de création des États Unis de l’Afrique Centrale imaginé par le Président Mobutu. La Charte de l’Union fut signée à Fort-Lamy sous les ovations nourries de la population tchadienne mobilisée pour la cause. Cette Union fit long feu. Le Tchad et la RCA se retirèrent vite de l’Organisation sans aucune réalisation convaincante.

 

Il en fut de même en Afrique de l’Ouest ou une Fédération du Mali fut créée en Avril 1959 comprenant le Dahomey, la Haute Volta, la République Soudanaise (actuel Mali) et le Sénégal. Il ne fallut pas plus de six mois pour que seuls subsistèrent le Sénégal et le Mali. En Septembre 1960, cette fédération aura vécu.

 

Le 7 juillet 2024 à Niamey, trois États enclavés d’Afrique de l’Ouest, le Burkina Faso, le Mali et le Niger dans une déclaration « irrévocable » dite de Niamey actent leur retrait de la CEDEAO établi par le Traité de Lagos signé en 1975 et comprenant seize États-membres. Cette Triade d’États signent dans la foulée l’acte Constitutif d’une Confédération des États du Sahel sur les cendres de l’Autorité du Liptako-Gourma créée en 1970, en vue développer les ressources de la région commune aux trois États. En 2015, elle se dote d’une défense à laquelle est assignée la mission d’assurer la sécurisation et le développement du Liptako-Gourma et de promouvoir la  lutte contre le terrorisme régional par une force commune aux trois pays. C’est plus tard en 2023, succédant au coup d’État du Niger, le Burkina Faso, le Mali et le Niger forment l’Alliance des États du Sahel consécutivement à la signature d’un pacte de défense appelé « Charte du Liptako-Gourma. »

 

Les atteintes à la démocratie chèrement acquise par les peuples d’Afrique

 

Il est de notoriété que depuis les quatre dernières années, quatre militaires dont trois officiers supérieurs et un officier subalterne, ont chacun dans leur  pays,  arraché le pouvoir du peuple en reversant les chefs d’États dont trois ont été élus par le peuple. Doumbouya et Tiani en Guinée et au Niger qui dirigeaient les bataillons de la garde présidentielle sont ceux-là même qui trahirent la confiance de l’impérium en les renversant. Pour assouvir sa vengeance vis-à-vis de son ex patron Mohamed Bazoum, Omar Tiani procède à sa longue séquestration et engage une procédure pour le faire condamner par une justice aux ordres. Au Mali, une contestation durable menée des mois durant par le M5-RFP avec la caution de l’Imam Mohamed Diko secoua les fondements du régime du Président Ibrahim Boubacar Keita. Le régime fut affaibli. Le pouvoir fut dans la rue. Un groupuscule de colonels profita du pourrissement de la situation créé par le M5-RFP et procéda sans heurt le 18 août à l’arrestation du Président de la République. Alors que la population salua ce changement comme une insurrection populaire, la junte quant à elle y voyait sa victoire propre. Usurpation éhontée ! Elle crée le mouvement patriotique pour le salut du peuple dirigé par le Colonel Assimi Goïta, le chef de la junte. Nonobstant cette distorsion, la junte et les leaders du M5-RFP conviennent d’une transition politique et du retour à la légalité constitutionnelle dans un délai raisonnable. Un gouvernement fut promu avec un Chef d’État de transition auquel est adjoint le Chef de la junte Assimi Goïta. A peine huit mois plus tard, celui-ci fait procéder au renversement du Président de transition Ba Ndaw et s’autoproclame président de la Transition malienne le 21 mai 2021. C’est alors qu’il met en œuvre de sordides manœuvres. La période la transition s’est terminée le 26 mars 2024 sans que les élections n’aient été organisées. Au Burkina Faso, le 30 Septembre  2022, un sinistre capitaine de trente-quatre ans  du nom d’Ibrahim Traoré, renverse un autre putschiste le Lieutenant-Colonel Damiba contraint à l’exil. Il évoque pour raisons à ce putsch l’incapacité de ce dernier à éradiquer le terrorisme djihadiste qui écume l’intérieur du pays. Il crée « le mouvement patriotique pour le salut et la restauration. » et se fait plébisciter  Président du mouvement et Président de la Transition. Les élections devant consacrer le retour à l’ordre constitutionnel décidé par le Conseil de refondation fixées au mois de juillet 2024 ne sont plus à l’ordre du jour.

 

La gestion des pays par les juntes au pouvoir.

 

Les Trois putschistes ont institué dans les pays ce qu’il est convenu d’appeler un totalitarisme avéré. Les assemblées nationales ont été dissoutes, les partis politiques suspendus, les associations des droits de l’homme réduits au silence. La société civile menacée. Les leaders de l’opposition réclamant le respect des engagements sont arrêtés et embastillés. Les libertés publiques notoirement compromises. Une propagande anti-européenne s’est développée. Un climat de terreur règne partout. La grogne enfle mais une répression sauvage  est opérée dans le sang. Au Burkina Faso, un régime patrimonial est institué et un système de caporalisation des milices est organisé. Les dénonciations calomnieuses font rage, les enlèvements d’officiers et de leaders politiques constituent les moyens pour réduire au silence. Au Mali, la junte dirige le pays d’une main de fer. L’Imam Dicko menacé dans sa vie. Au Niger, c’est la chasse aux pays occidentaux, la France, les Etats-Unis et leurs bases militaires accusées d’entretenir le terrorisme par le soutien aux groupes djihadistes sont honteusement renvoyées du pays. Sur le plan économique, la misère perdure et se creuse davantage.

 

La question du retour à la légalité constitutionnelle ne hante pas les juntes au pouvoir. Goïta, envisage le retour quand la junte aura restauré la sécurité dans le pays. Ce qui est vu par beaucoup comme une clause de style. Mieux encore, il fait adopter une Constitution qui l’autorise à présenter sa candidature à l’élection présidentielle. Au Niger, malgré les sanctions, cette question n’est pas à l’ordre du jour. Au Burkina, la date des élections prévues au mois de juillet passe sans que personne ne s’en émeuve. Ce n’est pas la priorité.

 

Cependant la grogne se poursuit et enfle dans les pays et les soutiens aux putschistes se sont transformés en rejets haineux. Depuis les putschs, l’autoritarisme et la répression sont mal vécues par la population. Et les groupes djihadistes amplifient plus que jamais leur action meurtrière.

 

L’absence de légitimité

 

Ces chefs des juntes autoproclamés ne tiennent leur légitimité que d’eux-mêmes. Ce qui implique qu’ils manquent de légitimité populaire. Ils semblent ignorer que ce déficit de légitimité invalide tous les actes initiés par eux au plan national et international. La souveraineté appartient au peuple qui l’exerce par la voie de ses représentants élus. Ces putschistes sont loin de comprendre ces vérités. L’on ne peut s’empêcher d’affirmer qu’il y a un recul par rapport à la période précédant leur intrusion malheureuse sur la scène politique.

Un pan de voile est levé

 

Quelle que soit la longueur de la nuit, le jour finit par apparaitre. Les jours et les années passent et un pan de voile est levé sur les ambitions réelles des putschistes. Leur objectif le plus précieux est de faire main basse sur les pays et de se maintenir ad vitam æternam au pouvoir. Aucun signe montrant même en clair-obscur leur intention d’organiser le retour à la légalité constitutionnelle n’est perceptible. Le retrait des pays du giron de la CEDEAO fut la réponse à la pression internationale mise sur eux pour s’imposer une transition la plus brève possible. Dire précipitamment adieu à l’organisation régionale est le subterfuge concocté de concert pour se soustraire au diktat de cette engeance devenue suffocante. C’est également un pied de nez à l’organisation de l’Union africaine  et davantage  à la communauté internationale. Voilà le secret inavoué.

 

De l’Autorité du Liptako-Gourma à l’Alliance des États du Sahel

 

Les putschistes ont récupéré très rapidement un dossier d’il y a cinquante-quatre ans, dépoussiéré  en 2023 puis transformé en une alliance et une Confédération pour créer un évènement spectaculaire et donner de la résonance à leur désengagement de la CEDEAO. Quelle valeur tactique et économique accorder à cette enclave peuplée de dix-sept millions d’individus dont la moitié est durablement installée en Côte d’Ivoire, au Nigéria, au Tchad, au Sénégal. Alors que l’Afrique tend vers une unité, cette donne consacre une nouvelle balkanisation face à l’existence la CEDEAO. En Afrique centrale, la tendance est à un renforcement du regroupement avec la création récente de la CEEAC qui comprend bien onze États dont font parte les États formant la CEMAC au nombre de six. Les narratifs qui ont émaillé la déclaration de Niger et l’Acte constitutif de l’AES cachent mal les motivations réelles de cette alliance des États qui ont pour commun dénominateur une option de colonisation par la société militaire privée russe l’Africa corps qui, de façon systématique, saigne les maigres ressources des pays, s’intéresse aux mines et se lance dans la concurrence déloyale avec les entreprises privées existantes tout en s’affranchissant du paiement de la fiscalité. Par ailleurs, l’AES est perçue par les peuples davantage comme une alliance des chefs d’États putschistes en vue de protéger et pérenniser leur pouvoir qu’une entité dévolue à de nobles desseins en faveur de la population qui a été tenue à l’écart des discussions.

 

La Faiblesse des armées des États de l’Alliance

 

Au Mali, au Niger, au Burkina Faso, le recours au mercenariat russe constitue un indice suffisant pour témoigner que les armées nationales ne sont pas en mesure d’assurer les  missions de sécurisation du territoire qui leur sont dévolues, et pourtant les contribuables assurent leur salaire. C’est pour cette raison que  les États de la CEDEAO, que ces putschistes incapables accusent de manquer de solidarité, ont déployé leurs soldats pendant une dizaine d’années au Mali dans le cadre des missions de la MINUSMA. A moins d’être amnésique, la junte malienne ne saurait prendre pour sincère la phraséologie insultante à l’égard de la CEDEAO, qui n’est en réalité que perfide prétexte pour plaire à ses nouveaux maîtres. La raison du retrait est ailleurs.

 

La convoitise des richesses du sous-sol de la triade

 

Les États de l’AES regorgent de richesses minières qui créent la convoitise à l’intérieur comme à l’extérieur. Le Niger avec son uranium, sa bauxite et son pétrole, le Burkina Faso, doté d’importantes réserves aurifères, et d’un potentiel de gisement de manganèse au niveau mondial, du fer  du phosphate, le Mali pourvu d’une variété de ressources telles l’uranium, l’or, le diamant, le pétrole, le fer, la bauxite, etc. les richesses du Liptako-Gourma constituées d’or, de phosphate, de manganèse, du fer etc. tout cela ne laisse pas indifférents les puissances avides de ces ressources pour alimenter leurs industries, encore moins les juntes qui n’auront pas d’état d’âme pour s’enrichir.  L’exploitation de ces produits profiterait elle à la population ? Rien n’est moins sûr. Mais on a la certitude que contre la garantie de sécurité qu’apporte à son pouvoir, le nouveau partenaire impose l’attribution des gisements de ressources minières à forte valeur. Cette exigence porte préjudice aux nations engagées sur cette voie. Mieux encore, ce partenaire met sous sa tutelle le pays en question. L’avenir de l’AES entre les mains du nouveau partenaire est plus que compromis.

 

Le ver est dans le fruit

 

On a du mal à appréhender le bénéfice économique que les peuples des États dirigés par le triumvirat soldatesque de putschistes tireront de cette alliance trompe-œil. Cette alliance apparait plutôt comme une mésalliance des États du Sahel avec la société russe Africa corps dirigée depuis Moscou. Le moins que l’on puisse dire est que cette alliance répond à la formule « mets-toi à genoux que je te bénisse. » Les peuples souverains de ces États ne sont pas concernés par cette affaire d’ombres chinoises, ourdies par des putschistes sans légitimité. L’époque où les peuples étaient passifs est révolue. De plus en plus, ils prennent leur destin en main.

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